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31 mai 2010 1 31 /05 /mai /2010 11:01

Enfin !


Nous attendions cet événement depuis 1 mois, et nous en parlions depuis plus que cela.
Nous sommes le 23 Mai, le jour J du trail de la Lozère : le trail où je vais faire une distance et un temps jamais fais avant.
Aucun des membres de la team ne connait cette course, et ca sera une surprise pour tous.
Patron nous avait bien rassuré sur le profil de la course : "beaucoup plus roulant que le Ventoux" : et nous, le Patron, on le croit, car c'est le Patron.

Il est 07h30, nous partons de La Canourgue. La température est à 8°.
Arrivée sur place, il y a beaucoup de monde, difficile de trouver une place pour garer la voiture. Ultimes préparatifs avant d'aller sur le point de départ.

Lozere 2010 011
Le Patron donne interview à une radio locale : quelle popularité ce Patron : les 3 autres membres de la team sont inconnus ici. Comment fait il ?
Toute la team fait honneur a la bonne humeur d'avant course. J'ai d'ailleurs remarqué que plus une course s'annonce difficile, et plus c'est l'euphorie générale. C'est encore un autre mystère de ce sport.
Donc méfiance, car la team est d'excellente humeur ce matin....

Le départ est donné, et Patron et moi lâchons très vite Mathieu et François.
Km2, je fais signe à Mathieu qui est déjà à 300m derrière. Le Patron a l'air d'être en forme ce matin, et je trouve qu'il impose un rythme un poil élevé. Il relance, il "tarte" fort dans les descentes...Je ne le lâche pas, tout en sachant que si j'étais parti seul, je serai allé un peu plus doucement pour cette première partie.
La chaleur est déjà écrasante, les montées sont difficiles, et je doute un peu sur mon niveau de forme ce matin. Les jambes sont lourdes et la route est longue.
Les paysages sont splendides : c'est vrai que c'est un des plus beaux trail de la région.
Arrivée au premier ravitaillement km14, nous faisons le plein de nos Kamel avec Patron, et je réalise que nous avons déjà bu énormément. Biscuits salés, raisins, coca, etc....
Allez, on repart avec une belle cote pour nous faire digérer.
Km16, je téléphone à Mathieu pour prendre des nouvelles. Il est est visiblement 400m derrière... Nous ralentissons un peu pour essayer de le récupérer, mais en vain.
Patron commence à avoir des signes de fatigues, et me fait part de quelques inquiétudes...
km 17, j'ai des petites crampes : un peu tôt tout de même !
Km20, je me sépare progressivement du Patron, qui semble ralentir la cadence.
Descente difficile dans une forêt, traversé d'un petit ruisseau, et le deuxième ravitaillement arrive au km 26 : bienvenu, car j'en peux plus.
Je mets 1,5 litre d'eau dans mon kamel pour 12 km parcouru entre entre les deux ravitaillements : c'est confirmé, je bois énormément, en alternant régulièrement des cachets anti-crampes qui s'avéreront inefficaces me concernant.
Quelques mots échangés avec les parents de Mathieu qui était présent au km26, et me voilà reparti avec pour objectif le ravitaillement solide du km30. J'ai le moral, je suis désaltéré, c'est beau, j'ai vu du monde.
C'est reparti : énorme montée, qui confirme donc la difficulté du parcours.... Mon moral replonge immédiatement. J'appelle Magic pour prendre de ses nouvelles. Il me lâche sur un ton humouristique ("je vous maudis Patron et toi, j'en chie"). Et là, dans une grande honneteté et spontanéité, je lui réponds : "c'est pas fini, après le km26, ça monte de folie ! Mais il parait qu'après le km30, il y a une grande descente..." On en reparlera de cette descente...). Je crois qu'à cet instant, j'ai dû assomer notre p'tit Magic... Mais il en faut plus pour le mettre KO, car il a un solide moral.
Voilà le km 30, je suis déjà maxi en bouillie. Dans un p'tit coin de ma tête, j'espère retrouver Mag et Lisa à ce ravito, mais je délire un peu : il est que 12h30, c'est impossible de les retrouver là, et avoir un petit coup de booster....mais j'y croit toujours un peu.... mais effectivement personne....

Photo0049

Les crampes sont de plus en plus présente lors des montées et descentes.
Etirements, alimentation et boissons avalés dans les plus bref délais. Le moral revient, car il reste "que" 15km, et il parait que ça descend derrière...et puis mes filles vont finir par arriver, j'en suis sûr.
Après le km30, effectivement ça descend, mais un petit détail : ça descend de folie, pas moyen de courir ! Il y a des cordes pour se tenir.... Grrr : les crampes sont trop présentes, je prend un peu le temps de les faire partir, des cachets, toujours des cachets...Je ne les compte plus, je suis tout simplement chargé comme une mule.
Et là, j'ai une pensée pour mes p'tits camarades derrière : je suis pas inquiet pour Patron, qui a l'expérience. Par contre, Mathieu est très peu entraîné, et Magic est un très (trop?) jeune "poulain" pour être lâché en pleine nature sur une aussi longue distance... Je crains l'abandon pour mes deux Poulains....
En pleine descente km32, je me tord la cheville droite : j'ai une belle douleur, et un doute arrive : si j'ai encore mal au prochain ravito, je serai contraint à l'abandon. Il serait vraiment dommage d'abandonner pour blessure !
Après une descente très pentue, la logique est respectée : une forte et longue montée pour aller chercher le prochain ravitaillement au km36... J'en peux plus, c'est vraiment dur. Ma cheville n'a finalement rien, mais ça suffit pas à me redonner le moral...je ramasse grave comme on dit dans le jargon des runners...
Le Km 36 est très long à arriver : enfin la civilisation : un bonhomme de l'organisation avec une pauvre bouteille d'eau est là, au milieu du chemin : toujours pas mes filles à l'horizon... L'homme en rouge m'indique que le prochain ravito n'est pas maintenant, mais dans 3 km : dur à entendre quand on ne pense qu'à çà depuis plus d'1h et que ça fait plus de 5h de course.... Moral dans les chaussettes, voire sous la semelle, je ne prends même pas la peine de remercier le gars pour son info pourrie... J'enchaîne sans réfléchir, en me disant qu'au bout du chemin, il y aura tout le monde pour m'encourager... J'ai soif, j'ai chaud, j'ai mal : j'en peux plus. C'est un truc de dingue ce trail.

Photo0050

Que deviennent mes copains de galère ? Pas la force de les appeler, je suis trop carbonisé...Tu parles d'une sortie conviviale : chacun cours seul et dérouille comme jamais.
Km38, je suis évidemment toujours en bouillie, de plus en plus : je ne comprends même pas comment j'arrive encore à courir... Un homme en rouge me dit : "dossard 24, c'est vous : il y a quelqu'un qui vous attend dans 1 km!". Je reste stoïque, non pas que je sois insensible, mais non, vous le savez, je suis trop cramé pour lui faire un signe. A cet instant, les larmes me montent, quand la fatigue est telle, l'émotion n'est jamais très loin. Je pense à Lisa qui doit gambader au bord de la route, et son Papa qui arrive en vrac. Allez, je retiens quelques larmes qui sont prêtent à tomber, je lève la tête, et au bout de la route, je vois Magali qui m'encourage.... Oh mon dieu comme je dérouille, mais je cours toujours, à croire que c'est mon corps qui décidera de s'arrêter sans me demander mon avis..... Elle court à mes côtes, je suis à 12-13km/h, je lui dit quelques mots (du genre : "j'ai des crampes depuis plus de 3h, "y a plus rien dans le sac", je lui parle de bouillie, de carbonisé, de ramassage, de déglingué" : bref, il fallait pas qu'elle compte sur moi pour lui remonter le moral à cet instant !). On arrive au ravitaillement du km39, tout le monde est là, je suis le premier de la team, et j'ose pas imaginer le show qu'on va tous donner devant nos spectateurs à cet endroit. Lisa n'ose pas m'approcher ("mais qu'est ce qui fait Papa dans cet état a dû t-elle se dire), je lui fait un max de bisous en un minimum de temps, et je vais m'alimenter pour ne pas m'effondrer devant tout le monde comme une vieille saucisse sèche.

 


Je mange et boit comme quelqu'un qui vient de traverser un désert : je mets de l'eau dans mon kamel : Mag immortalise ces moments peu glorieux : c'est cà la course : il faut filmer les moments pénibles, c'est là où c'est beau.
05h45 de course : je demande à Mag si elle sera à l'arrivée car j'ai des doutes sur mon état à la fin, et je repart en abandonnant tous mes amis sur un chemin interminable.
Après 2 km de chemin, je réalise que le chemin tourne sur la droite, et monte méchamment après une pancarte peu comique au vue des circonstances "Attention, faux plat montant". Les crampes m'empêchent d'enchaîner,  je dois m'arrêter régulièrement, et j'effectue là mon chemin de croix pour atteindre le dernier sommet qui est au km42 : laborieux !

Photo0051


J'aperçoit d'en haut l'arrivée tout en bas, à 2km : je commence à sentir l'écurie (il était temps). Allez dernière descente, mais de loin la plus difficile : 25% : il faut tenir la corde pour ne pas tomber : faut le mériter ce putain de trail !

Lozere 2010 023
km43 : c'est bon, on peut courir, je sent de plus en plus l'écurie. J'accélère, comme si je jouait à cet instant une médaille d'or. Oubliées les crampes, oublié le pleurnichage : place à l'arrivée! Mag m'accompagne sur les 300 derniers mètres  : du bonheur intense que je suis heureux de partager. Je réalise que c'est la course la plus difficile que j'ai jamais faite : 45km, 2400 mètres de dénivelés : du bonheur à l'état pur.
Je passe la ligne, je me tiens à la barrière, je prends mon putain de tee-shirt, et me laisse tomber comme une vieille merde dans l'herbe. Je pense à mes p'tits camarades, et notamment Magic et Mathieu : sont ils dans la voiture balaie, ou sont ils toujours en course ?

Bilan : 6h32 - 45 km, environ 2,5 kg de perdu, et 8 litres d'eau bue pendant toute la course...
Et un excellent souvenir : aller au bout de soi-même est toujours un plaisir ultime.

Vivement le prochain !

Fx.

 

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